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« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Le problème majeur quand on aimait rédiger des lettres manuscrites en 2018, c’était qu’on ne recevait pas souvent de réponse. Habitués à vivre sans jamais s’arrêter, un message par-ci et un mail par-là, les gens n’avaient plus le temps de penser à se poser sur un bureau pour réfléchir aux mots qu’ils coucheront sur le papier. Craig n’en voulait pas à Tobias de ne pas lui avoir répondu depuis un mois. Il avait sûrement un millier de choses à faire et autant d’endroits où être, tout comme Craig, si seulement il n’avait pas besoin de ce temps de calme où la plume parlait à sa place. L’Élu du Lion croulait vite sous le travail s’il ne s’avançait pas un minimum, et un récent accès de fatigue l’avait tenu un peu trop éloigné de son bureau.
C’est pour cela qu’il resta plus longtemps à travailler ce soir-là. Genre, beaucoup plus longtemps que d’habitude. Il payait ses quelques jours à traîner la patte en terminant le boulot à une heure indue, si avancée qu’il serait plus simple pour lui de faire une nuit blanche que d’aller se coucher aussi… tôt. Le chiffre qu’il lisait sur sa montre lui donna le vertige, mais lui rappela aussi qu’il n’était peut-être pas trop tard pour se vider la tête en sortant un peu.
Quand il était plus jeune, Craig sortait quand il le pouvait : pas forcément sociable, il aimait l’ambiance des pubs et danser en boîte, quitte à rester seul. Généralement on ne l’emmerdait pas trop, et il avait pensé qu’en allant juste boire une bière dans un bar on le laisserait tranquille. Même pas. Il avait fallu qu’il reparte d’où il était venu, pas parce que Tobias l’avait sorti du bar, mais parce qu’il avait été terriblement gêné d’être la source du conflit. Il avait depuis évité l’endroit et adressé une lettre d’excuse… Et voilà où il en était, à se demander s’il ne devait pas retenter le coup, parce que le tenancier ne lui en voulait pas et que l’endroit, mis à part l’interruption d’un autre client, lui avait été fort agréable. À réfléchir à quelle tenue il allait porter pour passer inaperçu. À la manière dont il réagirait s’il se faisait encore reconnaître.
Il ne devrait pas sortir, sachant son importance au sein de l’Alliance et le fait que ses traits soient connus. Mais il ne pouvait pas non plus s’enfermer dans sa tour d’ivoire comme une princesse qui rechignait à en descendre pour se mêler à la foule. Il n’avait pas été élevé comme ça, lui qui n’avait pas eu d’Élu du Lion dans sa famille depuis au moins trois générations. Il aurait pu se contenter de vivre richement et de regarder le monde par sa fenêtre, mais le temps où il aimait s’isoler était révolu. Il ne pouvait pas prendre de décisions sans connaître la vie de ceux sur qui il avait du pouvoir. Tant pis.
Il se changea : ses beaux vêtements firent place à d’autres plus modestes, une chemise à carreaux par-dessus un t-shirt avec un simple jean et un sweat à capuche. Il n’eut pas le mauvais goût de rabattre la capuche sur ses cheveux qu’il avait légèrement défaits : ça aurait eu l’effet inverse niveau discrétion. Les fausses lunettes de vue auraient été peut-être utiles, mais Craig n’avait pas envie de tricher à ce point-là. Il espérait que ceci ferait l’affaire.
Il quitta en catimini le château, avant de rejoindre Edimbourg en voiture, se garant assez loin de l’endroit pour avoir le temps de marcher et de respirer l’air nocturne de la ville. Il se souvenait parfaitement d’où était le bar, non pas qu’il ait une mémoire spatiale infaillible, mais il avait noté l’adresse. C’était plus pratique quand on envoyait des lettres. Reste que sur le coup, il se demanda s’il ne s’était pas planté, parce qu’il n’y avait pas l’air d’avoir beaucoup d’activité dans le coin. Il y avait cependant encore de la lumière, alors il entra, mais l’air pas franchement convaincu, observant autour de lui.
Le bar était désert excepté pour deux poivrots qui semblaient trop faits pour rentrer chez eux. Surpris, Craig se tourna vers l’homme derrière le bar, qui heureusement était celui auquel il s’attendait.
— Au moins n’y aura-t-il personne pour témoigner de ma présence ici, dans ce lieu si indigne de ma condition, hmm ?
Craig ponctua sa phrase d’un petit rire, signe qu’il plaisantait. Il aimait la décoration et l’agencement du bar, peut-être encore plus que sa bière. Bon, pour le chapitre « se mêler à la foule » on reviendra, mais au moins serait-il peinard cette nuit.
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Ven 14 Sep - 10:06
Nocturnal Animals.
Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes
Dormir... C'est un concept particulière nécessaire à la survie de l'être humain. Apparemment, moi je n'ai pas droit à ce détail pourtant si essentiel. Je dois être puni, ou un truc comme ça. Et c'est pas faute d'avoir le visage qui hurle, silencieusement, que j'aimerais m'allonger sur le comptoir et rester là un jour ou deux. Mais non, je suis toujours là, debout, éveillé autant que possible, occupé à essuyer des verres, le t-shirt taché de quelques éclaboussures d'eaux.
Le canapé est occupé par deux types d'une trentaine d'années tellement alcoolisés qu'ils finiront par s'endormir l'un sur l'autre. Ils ont déjà du mal à parler et bouger... Au moins ils ne font pas de bruit, et du moment que je ne dois pas sortir la serpillière, je m'en fiche un peu. Je préfère encore leur laisser le canapé pour cette nuit et leur faire payer une demi-nuit au petit matin quand il seront trop largués pour me contredire. Abus? C'est pas moi qui suivre ivre-mort et incapable de rentrer chez moi. Je suis sobre, épuisé, et déjà chez moi. Ma maison, mes règles. Cela dit, lorsque j'entend la porte s'ouvrir, j'ai un soupir qui traverse mes lèvres.
On va fer... - Au moins n’y aura-t-il personne pour témoigner de ma présence ici, dans ce lieu si indigne de ma condition, hmm ? - Tiens. - Est-ce que je peux lui fermer à la tronche? Pouvoir, oui, bien sûr. Oser? Je pourrais, si je le voulais vraiment. Mais le faire? Je suis trop agréablement surpris de revoir cette tête-là dans mon bar pour mettre l'heure tardive en action. - Hey, si vous venez pour être désagréable, je vous fais payer double. - Que je lui répond sur le ton de l'humour, quoi qu'avec l'état de fatigue avancé qui me tient, mon sourire manque clairement de vigueur. Posant le verre sec devant moi, je croise les bras. - Je ne m'attendais plus à vous revoir ici. - Faut dire que la première fois, la seule, où il est venu, il s'est presque fait agresser par l'un des clients qui avait un peu trop bu pour son bien. Au moins, ce soir, il ne risque rien. Encore que vu l'heure à laquelle il ose débarquer, je ne répond plus de rien.
Un coup d’œil lancé à mes deux boulets du soir, l'un endormis, la bouche ouverte, et l'autre les yeux grands ouverts qui fixe le mur face à lui tel un cadavre prêt à se décomposer, je reviens à Forbes. - Alors? Qu'est-ce que je vous sers? - Parce que si je ne le met pas dehors, je dois bien lui servir à boire, non? - Et choisissez bien, parce que je prendrais la même chose. - Pas de pression.
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Ven 14 Sep - 21:05
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Est-ce qu’il avait bien compris ce qu’allait dire Tobias ? Il était prêt à fermer ? Merde. Cela ajouta à la gêne de Craig, qui pourtant se sentit trop las pour faire demi-tour. Il l’avait dérangé de toute façon, autant aller jusqu’au bout, non ? Moyen comme justification, mais on n’était plus à ça près, d’autant plus que si le barman voulait le foutre dehors, il ne se serait sûrement pas gêné. La plaisanterie qu’il fit donna l’impression à Craig qu’il allait pouvoir squatter au moins un moment ici.
— Et je paie le triple si tu me tutoies.
Il était habillé de la manière la plus casu possible, si bien qu’il se ferait refouler à l’entrée d’une boîte, et il était venu ici pour boire de la bière et oublier les courbettes. Le vouvoiement en faisait partie, même si ça n’effleura même pas l’esprit de Craig que Tobias eût pu vouvoyer tous ses clients.
Craig s’avança jusqu’à poser ses fesses soit-disant royales sur un tabouret, et s’accouda au bar. Les deux gars torchés dans le fauteuil ne l’inquiétaient pas plus que ça : au pire s’étoufferaient-ils dans leur vomi.
— Je ne m’y attendais pas non plus, mais j’en ai marre de rester enfermé. On dirait que j’ai mis trop de temps à me décider, cela dit.
Il avait largement sous-estimé l’heure qu’il était, ou alors avait passé trop de temps à choisir son costume de mec random. Ou alors il avait traîné sur la route. Il ne s’en était pas rendu compte, et c’était pour ça qu’il était là à empêcher un honnête homme d’aller se coucher. Il avait bien quelques remords à ce sujet, mais une sombre partie de lui en profitait allègrement et sans mauvaise conscience.
— Je te laisse le choix dans la bière, je n’irais pas jusqu’à dicter la vie des gens jusque dans le contenu de leur verre.
Décider, ça pouvait vite devenir chiant et clairement, Craig avait bien envie de vacances de ce côté-là, même s’il ne s’agissait que de s’éviter la responsabilité d’un choix de bière. Rien que ça, ça le changerait un peu. Ok il dirigeait l’Alliance avec son triumvirat mais je sais pas, vivez vos vies un peu aussi là.
(c) DΛNDELION
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Ven 14 Sep - 21:40
Nocturnal Animals.
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Et je paie le triple si tu me tutoies. - Un fin sourire né sur mes lèvres et je hausse les épaules en posant mon torchon à côté de l'évier sous le comptoir. - C'est ton argent. - Après tout, pourquoi pas. Le vouvoiement est une simple habitude, en particulier avec les clients. Je ne tutoies que les étudiants qui viennent parfois cuver ma bière, peut-être parce qu'à mes yeux ils sont encore trop jeunes pour que j'en vienne à les vouvoyer. Ou peut-être parce que d'une certaine manière, je me place encore dans la même tranche d'âge qu'eux? Allez savoir.
Craig traverse la distance et vient s'installer sur l'un des tabourets face à moi, les coudes posés sur le comptoir de bois que je viens tout juste de nettoyer. Pas que ça se voit d'ailleurs, le bois est sombre et l'eau déjà sèche. - Je ne m’y attendais pas non plus, mais j’en ai marre de rester enfermé. On dirait que j’ai mis trop de temps à me décider, cela dit. - Oh, j'ai l'habitude. - Dis-je en attrapant déjà deux grands verres à bière marqués du logo d'une quelconque marque. - Je te laisse le choix dans la bière, je n’irais pas jusqu’à dicter la vie des gens jusque dans le contenu de leur verre. - Tu sais, j'aurais pris autre chose si ton choix ne m'avait pas convenu, mais puisque tu insistes...
C'est bizarre. Non, honnêtement, c'est bizarre. Tutoyer dans les yeux l'un des membres du Triumvirat, dans mon bar, à je sais pas quelle heure de la nuit, pour lui servir à boire... Non en fait c'est juste le tutoiement. J'ai pas l'habitude. Et quoi que je ne comptais pas non plus faire des courbettes dans tous les sens, encore moins chez moi, en venir aussi rapidement à de telles familiarités avec une personnalité qui, quoi qu'on en pense, n'est pas n'importe qui, bah ça fait bizarre.
Enfin, quoi qu'il en soit, je sors de l'un des espaces réfrigérés sous le comptoir deux bouteilles d'une bière locale dont j'ignore le degré d'alcool. Et par ignorer, je veux dire que je le connais, mais je n'y fais pas attention, même si j'ai bien conscience qu'il n'est pas bien bas. Il avait qu'à décider lui-même. Les deux bouteilles versées dans les verres, elles retrouvent leurs petites copines vides dans la poubelle que je compte aller sortir plus tard.
Saisissant l'un des verres, je le lève entre nous. - À... ne pas rester enfermé. Parce que rester entre quatre murs en permanence, c'est pas fait pour tout le monde. - Worst. Toast. Ever. Au moins, la bière est bonne. - Oh, parlant de temps d'attente. Je suis désolé de ne pas avoir répondu à ta dernière lettre. J'ai été complètement surmené et j'ai pas pris le temps de me poser pour t'écrire.
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Ven 14 Sep - 22:10
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Exactement, c’était son argent et il faisait ce qu’il voulait avec, même le jeter par les fenêtres en achetant de jolies montres hors de prix par pure coquetterie, ou des costards sur mesure. Là, il pouvait toujours dire que c’était la fonction qui voulait ça, Craig adorait se sentir à l’aise et classe dans ses fringues. Cette nuit, pour passer inaperçu, c’était clair qu’il était à l’aise… Pour l’élégance par contre, on repassera.
Ses sourcils se froncèrent alors qu’il levait les yeux vers le barman : à quoi bon lui mettre la pression pour un choix de bière alors qu’il en aurait quand même fait qu’à sa tête ? C’était quoi le projet là ?
— Pourquoi tu veux que je décide alors ? T’assumes pas ou quoi ?
Pourtant, une mousse c’était pas le pire truc à devoir assumer, c’était pas comme si fallait trouver un prénom à un nouveau-né quoi. Peu importe. Craig l’observe alors qu’il sort deux bières en bouteille du frigo, d’une marque qu’il ne connaît que de nom. Tant mieux, il aurait l’occasion de goûter quelque chose de nouveau ! Un peu de changement ne lui ferait sûrement pas de mal. Ses yeux glissèrent du comptoir jusqu’aux mains de Tobias, avant de venir se fixer légèrement sur la droite de son visage, comme si la décoration était absolument captivante.
Craig savait qu’on ne voulait pas croiser son regard, surtout quand il n’y avait personne pour aider l’éventuelle victime de sa capacité. Il n’en voulait pas à ceux qui esquivait ses prunelles, et avait même pris cette habitude de parler aux gens en regardant ailleurs.
Il prit le verre quand il fut servi, et eut bien du mal à ne pas éclater de rire en entendant le toast. Un sourire naquit tout de même sur son visage, alors qu’il leva son verre :
— Au fait que je ne sois ni un hikikomori ni la Reine d’Angleterre !
Il but une gorgée, goûtant l’amertume et la fraîcheur de la boisson. Elle était bonne cette bière, il faudrait qu’il garde le nom de côté pour plus tard, même s’il se rendait déjà compte au goût qu’elle devait taper bien fort. Damned. Et lui qui gérait pas spécialement l’alcool, ça allait être beau.
Vinrent ensuite les excuses de Tobias quant aux lettres. C’est vrai qu’il n’avait pas répondu, ce qui avait accéléré la venue de Craig ici, mais était-ce vraiment une mauvaise chose ? Et puis, il ne pouvait pas vraiment lui en vouloir.
— Oh, t’en fais pas pour ça. Ça doit sûrement être plus simple d’avoir de tes nouvelles en surveillant ton compte facebook ou instagram…
Craig rit doucement. Il y avait bien des membres du Conseil qui vérifiaient quotidiennement que rien ne s’ébruitait sur Internet, mais il n’en faisait pas partie. William avait déjà dû insister pour qu’il ait un téléphone digne de ce nom – Craig ne regrettait rien, c’était pratique pour jouer quand on était aux toilettes – alors les réseaux sociaux… Non très peu pour lui. Il détestait téléphoner et trouvait les messages bien trop courts. Trop… abstraits, aussi. Tant pis pour lui s’il était si anachronique que son moyen de communication préféré était dépassé. Il n’allait pas en vouloir aux gens de ne pas avoir le temps ou la présence d’esprit de lui répondre.
— C’est juste que je préfère écrire. Les mots paraissent plus justes et précis quand ils sont sur du papier… À l’oral, on a vite fait de dire une connerie.
Il ponctua sa phrase d’une nouvelle gorgée de bière.
— C’est déjà bien sympa de ta part d’avoir répondu une fois. T’étais pas obligé.
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Ven 14 Sep - 22:31
Nocturnal Animals.
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Au fait que je ne sois ni un hikikomori ni la Reine d’Angleterre ! - La simple image qui se forme dans mon esprit suffit à déformer mon visage en un sourire plein et entier avant de prendre une gorgée de bière dont l'amertume me file un coup de fouet. Je sens rapidement aussi la légère chaleur qui se forme au niveau de mes pommettes, signe que ce degré d'alcool n'est effectivement pas si bas que ça. Quelle idée j'ai eu de prendre ces bouteilles-là...
Oh, t’en fais pas pour ça. Ça doit sûrement être plus simple d’avoir de tes nouvelles en surveillant ton compte facebook ou instagram… - Intrigué, je ne répond pas immédiatement, réalisant d'ailleurs que je n'ai pas touché mon téléphone, au fond de ma poche, depuis le début de la soirée. Je n'en ai simplement pas eu le temps. - C’est juste que je préfère écrire. Les mots paraissent plus justes et précis quand ils sont sur du papier… À l’oral, on a vite fait de dire une connerie. - J'acquiesce en silence, buvant une nouvelle petite gorgée avant de sortir le téléphone pour le poser sur le plan de travail et m'appuyer plus nonchalamment sur le meuble derrière moi.
C’est déjà bien sympa de ta part d’avoir répondu une fois. T’étais pas obligé. - J'étouffe un léger rire. - Je ne me suis pas senti obligé, rassure-toi. En fait ça m'a amusé de le faire. C'est vrai que c'est plus si fréquent que ça de réellement écrire à quelqu'un. - Mon verre toujours dans la main, j'en prélève une nouvelle gorgée et le pose à côté de moi. - J'ai jamais vraiment aimé téléphoner non plus, je dois dire. Y'a cette pression de... Il faut vite parler sinon on croit que ça a coupé. Je suis un adepte du texto, simple, rapide, tu réponds quand tu veux... Et surtout si tu veux. - Croisant les bras, je pose un instant mon regard sur le téléphone avant de revenir à Craig. - Les réseaux sociaux je m'en sers surtout pour le bar en fait, en terme de communication c'est génial. Mais personnellement, j'y suis pas vraiment. Tu veux me voir? Tu viens ici. J'ai pas assez de temps pour m'amuser à poster statut sur statut pour tenir les autres informés de ce que j'ai mangé à midi... Quand j'ai le temps de me poser pour manger. - La dure vie d'un propriétaire de bar. Au moins, j'ai engagé quelqu'un pour s'occuper du ménage des chambres, ça me fait ça de moins à faire.
Décroisant les bras, je reprend mon verre. - Mais du moment que tu as réussi à me relire, c'est déjà ça je suppose. - Quand on perd l'habitude d'écrire, on peut vite avoir une écriture de chat. Un chat qui a Parkinson. Bref, une écriture de médecin quoi.
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Dim 16 Sep - 11:00
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Tout n’était pas perdu pour le sens de l’humour émoussé de Craig, si Tobias riait à son toast stupide. Pourtant, il n’avait pas cherché bien loin dans la liste des gens qui sortaient pas de chez eux : il aurait peut-être pu faire un jeu de mots au passage, mais la fatigue était sûrement à blâmer pour son manque de créativité. L’alcool, pas encore : il fallait le temps à son corps d’assimiler tout ça, même pour lui qui ne tenait pas des masses. Dans quelques gorgées, il allait sûrement être bien trop bavard à son goût, racontant des trucs plus inintéressants les uns que les autres.
Il était sûrement déjà en train de saouler Tobias en le remerciant de lui avoir répondre. Dans un monde parallèle, c’est la moindre des choses, mais au XXIème siècle, c’était pas si évident. Au moins n’avait-il pas pris ça comme une corvée de devoir sortir un stylo pour écrire autrement qu’avec un clavier. Ils avaient ça en commun, de préférer l’écrit : Craig avait lu quelque part que c’était générationnel, et que, comme Tobias le disait, c’était moins intrusif d’écrire un message que d’appeler. Il haussa les épaules cela dit, pas vraiment convaincu.
— Je suis trop bavard, je crois. Les messages sont vite trop courts à mon goût.
Ce qu’il racontait dans ses lettres n’était peut-être pas non plus de la première importance, raison pour laquelle ça lui importait peu qu’elles arrivent rapidement. L’avantage des nouvelles technologies, et aussi ce que Craig détestait le plus avec elles, c’était que tout était instantané. Pratique en cas d’urgence, mais rapidement épuisant pour la vie de tous les jours.
La réflexion de Tobias à propos de l’usage des réseaux sociaux fit sourire Craig : au moins n’était-il pas de ceux qui prenaient leur bouffe en photo, c’était déjà ça. Il fut un peu plus alarmé à propos du fait que le barman n’avait pas forcément le temps de se poser pour manger… Où donc avait-il trouvé le temps de lui répondre ? Remarquez, s’il était pressé, ça expliquait son écriture de chat.
— Je connais des gens pires que toi, t’en fais pas. Et encore, t’écris en anglais, mais imagine devoir relire une écriture de merde quand c’est du russe ou du chinois… Heureusement que j’aime mes amis, hein.
Il rit doucement avant de reprendre une gorgée de bière. Son regard accrocha de nouveau les mains de Tobias quand il l’imagina en train d’écrire… Hmm, ça allait vite être gênant cette histoire : Craig détourna les yeux pour balayer la salle du regard. L’endroit était plutôt sympa, pour un bar d’Edimbourg. Il ne faisait pas trop select, pas plus qu’il ne s’abaissait au niveau de certains pubs vraiment dégueux. Non, c’était cool ici. Parfait pour venir boire une bière après la fermeture, en tout cas.
— J’aime bien l’intérieur. Tu l’as eu comme ça ou t’as refait la déco ? Ça donne envie de squatter en tout cas, du moins, quand y a personne pour me reconnaître.
Un petit sourire triste étira les lèvres de Craig, alors qu’il les trempait de nouveau dans la bière. Il savait qu’il devrait arrêter de courir après un anonymat qu’il n’aurait plus, mais c’était plus fort que lui.
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Lun 17 Sep - 9:32
Nocturnal Animals.
Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes
Je connais des gens pires que toi, t’en fais pas. Et encore, t’écris en anglais, mais imagine devoir relire une écriture de merde quand c’est du russe ou du chinois… Heureusement que j’aime mes amis, hein. - La prochaine fois, je t'écris en chinois. On verra si tu t'en sors avec mon écriture. - Après tout, je peux, pourquoi s'en passer? Dans la foulée, je bois une nouvelle gorgée et alors que Craig se prend à l'observation des lieux, je reprend l'essuyage des verres propres encore posés sur l'égouttoir à côté de l'évier. Il est peut-être là, mais j'ai quand même des choses à faire avant de réellement fermer. Mais sans trop chercher bien loin, je doute que ça lui pose un problème que je continue de travailler tout en discutant.
J’aime bien l’intérieur. Tu l’as eu comme ça ou t’as refait la déco ? Ça donne envie de squatter en tout cas, du moins, quand y a personne pour me reconnaître. - J'esquisse un sourire au souvenir de sa dernière visite et pose un premier verre à sa place avant de passer au suivant. - Oh tu passes bien inaperçu là. Regarde mes deux poivrots là-bas, si on ignore les tâches de je sais pas quoi sur leurs fringues, t'es dans le thème. - Même si le sweat-à-capuche a quelque chose de sexy que même quelques tâches ne peuvent retirer... Ou alors c'est lui. Allez savoir. - Mais je l'ai eu comme ça, oui. Enfin, j'ai eu les murs comme ça. C'était une boutique avant. Un truc qui vendait tout un tas de bric à brac.
La structure en bois était déjà apparente, le sol était aussi comme il est aujourd'hui, mais il faut bien admettre que lorsque j'ai acquis l'endroit, le tout était assez vieux et mal entretenu. Les toilettes du bas n'étaient qu'une seule cuvette dans une petite pièce, chose que j'ai dû arranger. - J'ai ajouté les meubles, le comptoir et toute l'installation. Le premier étage était dans le même état que le bas donc j'ai dû monter les murs et créer la salle de bain et... - Je pause un instant, juste le temps de me souvenir autant que de m'assurer que les deux ivrognes dorment et ne vomissent pas. - ... J'ai totalement refait le dernier étage sous les combles. C'était qu'un grenier avant, on y montait avec une échelle en bois. Maintenant je vis dedans. - Et je dois dire que j'en suis pas peu fier. Même si techniquement, j'ai pas fais moi-même tous les travaux par manque de compétences, j'ai malgré tout travaillé sur les plans avec Clara, et fais quelques petites choses pour me salir un peu les mains.
Ralentis durant mes explications, je reprend l'essuyage du second verre. - Enfin, si je dois être honnête, c'est ma sœur qui a fait le plus gros du travail de décoration. - Dis-je en désignant d'un signe de tête un cadre accroché au mur juste à droite du comptoir. C'est une photo d'elle et moi, le jour de l'inauguration juste avant que les invités n'entrent. - Mais j'ai fais des trucs aussi hein, quand même. - Oui, hein. Quand même!
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Lun 17 Sep - 19:12
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
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Le rire sonore de Craig s’éleva du comptoir pour résonner dans la pièce : si Tobias voulait lui écrire en chinois, grand bien lui fasse. Ça leur fera d’excellentes révisions, même si Craig l’utilisait assez régulièrement pour ne pas trop perdre. Le souci, c’était que c’était de l’écrit, et en manuscrit en plus… Il pariait que la plupart des jeunes Chinois, habitués aux claviers de tout poil, cherchaient davantage leurs caractères que lui, au moins pour les plus usuels.
— Écoute, je suis toujours là pour un bon défi !
Craig posa son verre avant d’écarter les bras en mode ‘come at me’ : ce serait de toute façon bien drôle qu’ils s’écrivent en chinois, ou dans n’importe quelle autre langue qu’ils maîtrisaient et qui n’était pas l’anglais. Il devrait le lui proposer un de ces quatre, tiens. Dans une nouvelle lettre, parce qu’il était comme ça le Lion, il lâchait rien.
Mais il était aussi observateur, et il ne se priva pas de se tortiller sur son tabouret pour voir l’ensemble du bar. Ça le distrairait peut-être du barman qu’il trouvait étrangement magnétique. C’était pas le but de le mettre mal à l’aise, de toute façon. Déjà qu’ils n’étaient que deux en pleine nuit (non, les deux autres comptaient pas)… Et puis bon, quand on savait ce que Craig était capable de faire, y avait de quoi partir en courant. Tout ce qu’il avait pour contrebalancer une éventuelle paranoïa chez son interlocuteur, c’était prouver sa bonne foi et avoir l’air de ne pas trop chercher le contact visuel.
Sa question eut une réponse intéressante : au moins le Fawkes avait vraiment la personnalité de celui qui en était le propriétaire. C’était toujours mieux, trouvait Craig. Mieux que ces établissements franchisés qui se ressemblaient tous. Il y en avait eu en plus des travaux, d’après ce que Craig comprenait, même si Tobias s’était sûrement occupé du plus gros, laissant la déco à sa sœur, comme il le disait.
— Oh, je vois, c’est donc elle qu’il faut remercier. Elle habite à Edimbourg aussi ?
Craig reprit de sa bière, et la finit : elle était descendue plus vite que prévu, surtout compte tenu de son taux d’alcool. Oh, peu importe, au point où il en était. Il prendrait une journée off le lendemain, de toute façon, et il pouvait très bien supporter une autre bière. Il n’était pas fragile à ce point-là, quand même.
— Tu peux m’en remettre une ? Une autre tiens, celle que tu veux.
Il se garda de préciser « moins forte » parce qu’il comptait bien profiter un peu d’une ivresse à laquelle il se refusait régulièrement. Lâcher prise, une fois de temps en temps, et oublier le boulot, c’est tout ce qu’il voulait en entrant dans ce bar.
(c) DΛNDELION
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Mar 18 Sep - 8:54
Nocturnal Animals.
Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes
L'appel du défi n'est jamais sans client et lorsqu'il écarte ses bras, comme un signe qu'il est prêt à me recevoir, j'esquisse un sourire malicieux. Oh il y aura droit, mais pas dit que ce soit seulement du chinois. Il faudrait qu'il décrypte avant de répondre, voilà qui rendrait l'échange de lettres plus... interactif? Mais encore faudrait-il que ça ne perde pas de sens. Après tout, si on s'écrit, c'est qu'on a des choses à se dire, non?
Oh, je vois, c’est donc elle qu’il faut remercier. Elle habite à Edimbourg aussi ? - Mon regard se voilà, juste l'espace d'une seconde, et mes traits déjà tirés par la fatigue ne trahissent donc pas plus la petite vague de tristesse qui me prend. Néanmoins, j'esquisse un sourire désolé avant de répondre. - Elle vivait dans un petit village à proximité, mais elle est décédée il y a quelques années. - C'était une petite maison entre deux autres, celle qu'elle nous avait trouvé lorsqu'on était arrivé en Ecosse. Je vivais à l'académie, donc elle pouvait vivre seule dans ce petit espace, même s'il a bien fallu prendre sur soit lorsqu'elle s'est mise avec... Avec...
Tu peux m’en remettre une ? Une autre tiens, celle que tu veux. - Je lève le regard, tiré de mes pensées chronophages en réalisant serrer bien trop fort mon verre qui n'a miraculeusement pas explosé entre mes doigts. - Ouais, pardon. Je te donne ça. - Le vidant d'un trait pour me redonner contenance, j'attrape celui de Craig, les rince tout deux au jet d'eau de la tireuse, puis les repose sur le comptoir avant d'aller chercher deux nouvelles bouteilles d'une bière différente. Cette fois une irlandaise, légèrement moins amère, légèrement plus aromatique, légèrement moins alcoolisée. Mais tout juste. Là encore, je n'ai même pas pensé à regarder, mais après celle que l'on vient de boire, aucun de nous deux ne devrait prendre le volant de toute façon. Légalement parlant, je veux dire.
Tu vas me dire ce que tu penses de celle-là. - Dis-je en servant son verre avant le mien, laissant gonfler une petite épaisseur de mousse blanche au sommet de chacun. Envoyant les bouteilles vides rejoindre leurs sœurs, je saisi mon verre, mais attend qu'il goutte le premier. Simple courtoisie. - Oh, au fait, tu veux grignoter quelque chose? Je sais pas ce qu'il me reste, mais je sais qu'il en reste, si jamais tu veux. - Oui parce que c'est pas le tout de boire, encore faut-il éponger. Et puis vu l'heure avancée, un petit creux est permis. Et puis... Moi j'ai faim.
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Mar 18 Sep - 14:18
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Craig avait dit une connerie, il s’en rendit compte tout de suite. Quelque chose dans l’attitude de Tobias avait changé, il se fit plus calme, même s’il se força à sourire. Craig avait, sans le savoir, toucher une corde sensible. L’explication ne tarda pas : sa sœur était décédée, et vu la manière dont Tobias abordait le sujet, ils avaient dû être proches. Les années avaient passé mais la douleur était toujours là, à en croire la voix du barman. Les yeux bleus (enfin presque) de Craig se levèrent vers son visage, accrochèrent une fraction de seconde ceux de Tobias alors qu’il lui murmurait :
— Désolé. Je ne voulais pas réveiller de mauvais souvenirs.
Son regard retomba aussitôt, tout gêné qu’il était. Il avait bien besoin d’une nouvelle bière là, maintenant qu’il avait fini la sienne et réussit à plomber l’ambiance. Penaud, il attendit que Tobias le serve à nouveau, évitant soigneusement de regarder dans sa direction. Il n’avait même pas eu la présence d’esprit de lui dire qu’il n’avait pas besoin de s’excuser…
— Oh, merci.
Sans attendre, Craig trempa ses lèvres dans le breuvage, appréciant sa fraîcheur et son arôme plus prononcé. Elle était différente oui, mais pas mauvaise. Il la préférait même à la première, qui avait été bien amère en comparaison.
— Elle est pas mal celle-là ! Et ouais, amène ce que t’as, je crois que c’est trop tard pour commander des pizzas là, de toute façon.
Des pizzas, le truc qu’il n’avait pas mangé depuis des plombes. Avec son statut social et son travail, il était plus habitué aux grands restaurants ou aux dîners solitaires chez lui qu’à simplement manger de la junk food en bonne compagnie. Il manquait juste un film ou un match de rugby pour que la soirée soit pleinement réussie.
— Et du coup, ça se passe bien ? Être barman ici ? T’es pas britannique, il me semble.
Craig n’avait pas pris beaucoup de risques en supposant cela : Tobias n’avait pas vraiment l’accent du coin, passablement incompréhensible pour ceux qui venaient de loin. Cependant, il n’arrivait pas à déterminer de quelle région ou quel pays venait Tobias, pas en se basant simplement sur sa façon de parler.
— Je suppose qu’en plus du chinois tu parles plein d’autres langues, si t’es passé par l’Académie : moi j’ai tout ce qui est nordique, sauf l’islandais, et aussi le japonais et l’allemand, et toi ? J’ai toujours été doué pour les langues je crois bien. Enfin, langues étrangères quoi, hein. Évidemment.
Bah oui, évidemment. Craig ricana de son propre sous-entendu stupide, rougissant avant de rire plus franchement, le regard toujours baissé sur sa bière. La nuit, avec un peu d’alcool, le Lion se transformait en gros félin taquin.
(c) DΛNDELION
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Mar 18 Sep - 14:50
Nocturnal Animals.
Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes
Désolé. Je ne voulais pas réveiller de mauvais souvenirs. - Ça va, ne t'inquiètes pas. C'est moi qui en ait parlé et tu ne pouvais pas savoir. - Lui assuré-je en m'occupant de ces bières. C'est vrai, j'en ai parlé, sa question était légitime. Aurais-je dû me taire? Non, je n'existe pas pour enfouir profondément la mémoire de ma propre sœur. J'existe seulement pour lui rendre justice. - Elle est pas mal celle-là ! Et ouais, amène ce que t’as, je crois que c’est trop tard pour commander des pizzas là, de toute façon. - Et bah justement... - Commencé-je en posant mon verre et me retournant, passant la porte ouverte côté bar pour rejoindre la cuisine à l'arrière.
Là, il ne peut pas me voir, mais il peux m'entendre si je parle assez fort: et je parle bien assez fort. - Bah c'est ça! Pizza! - Une pizza faite maison, avec des ingrédients pas maison. Enfin, j'en avais fais plusieurs, mais c'est la seule qui reste et quoi que j'espérais pouvoir l’engloutir seul dans mon coin, la partager n'est pas un mal pour autant. Vous savez, pour la préservation des abdos. Pas que je ne vive que pour ça cela dit. J'aime trop manger. - Et du coup, ça se passe bien ? Être barman ici ? T’es pas britannique, il me semble. - Je l'entend tout en déballant la pizza de son film plastique. Elle est déjà cuite, mais elle mérite un petit réchauffage. - Je suis Sud-africain, mais depuis le temps que je vis ici, j'ai appris à m'y sentir comme chez moi. - Répond-je en haussant la voix, peu inquiet que les deux poivrots s'en réveille. Pas avec ce qu'ils ont bu.
Enfournant la pizza, je reviens finalement du côté bar et retrouve Craig, toujours à sa place, posté sur son tabouret. Parlant langues et linguistique, de quoi me tirer un sourire, mais ce n'est pas à ça que je réagis. Mon sourire amusé, il vient d'ailleurs. - Pas assez, apparemment. Je peux? - Demandé-je sans vraiment attendre de réponse. Je tend le bras vers lui, peut-être un peu trop concentré sur la tâche pour réaliser la portée de mon geste probablement facilité par la bière. Mon index et mon majeur se posent sur sa mâchoire, un appui nécessaire pour que mon pouce vienne glisser le long de sa lèvre supérieure et l'en libère d'une ligne de mousse blanche provenant de la bière qu'il a déjà goutté. Et une fois fais, je relâche son visage pour venir coller mon pouce entre mes lèvres et le nettoyer. Et là, pour une raison ou pour une autre, je réalise ce que je suis en train de foutre.
Pardon. Ça me dérangeait. - Dis-je, hésitant, avant de prendre mon verre et boire une gorgée pour faire passer la gêne, glissant ma langue sur ma lèvres pour en retirer la mousse accrochée. Parce que c'est exactement le truc à faire pile poil maintenant. Bien sûr. - Et heu... Oui, du coup grâce à l'académie je parle Russe, Espagnol, Chinois et Français en plus de l'anglais et de l'Afrikaans que je parlais déjà avant. - Comme quoi, y'a pas que lui qui est doué en langue. Bref. Je bois une nouvelle gorgée, parce que ça semble tout arranger. - J'ai mis la pizza au four le temps de la réchauffer, ça arrive. Ça nous fera pas de mal. - Oui, accessoirement, j'ai pas bouffé de la soirée. Ça se voit, non?
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Mar 18 Sep - 15:36
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Même s’il n’avait pas pu savoir, ce qui était d’ailleurs très juste, Craig s’en voulait un peu d’avoir visé pile là où ça faisait mal. Tobias avait beau le prendre avec une certaine philosophie, avec le recul qu’il avait depuis le temps, Craig le sentait triste, et ce n’était pas le but de la soirée. Cette soirée n’avait pas de but, de toute façon, si ce n’est celui de boire et d’oublier un peu le travail. Et apparemment, de manger des pizzas.
Craig n’aurait pas pu tomber si bien, car c’est une pizza qu’il restait en stock pour eux, ce qui suffirait largement. Le Lion ne mangeait pas autant qu’on pourrait le croire, et rarement des choses aussi peu diététiques. Il fallait bien garder la forme, après tout. La bière n’aidait pas, mais bon, une fois de temps en temps… Tiens, Tobias était sud-africain ? C’était assez rare, songea Craig, qui ne put s’empêcher d’étaler le peu de science qu’il avait.
— Oh, je connais pas bien ce pays, ce serait intéressant d’en parler, si tu veux. Je veux dire, je connais que Die Antwoord, District 9 et Chappie… Ça fait léger.
Les lèvres de nouveau dans la mousse, Craig ne se rendit pas compte qu’il s’en était mis un peu partout, et surtout, il ne vit pas du tout arriver Tobias. Ce dernier le surprit, bien que ce ne fut sûrement pas son intention, en s’étirant vers lui pour retirer la mousse de sa lèvre supérieure et… la… porter à ses propres lèvres. Euh. Ok.
La bouche de Craig en resta légèrement entrouverte, alors qu’il sentit le rouge monter aux joues. Désormais à la surprise se mêlait la gêne, un certain plaisir à être ainsi touché, c’en était flatteur… Et vu ses autres réactions physiques, la honte. Qu’est-ce qu’il faisait là ? C’était un mec, bordel, ça ne voulait rien dire, il a juste été… sympa ? Taquin. Craig se mit à rire nerveusement, mais juste assez tard pour qu’on n’y croit pas vraiment, juste assez pour que le doute subsiste.
— T’inquiète pas, c’est rien.
Il pouvait même recommencer s’il le voulait, mais ça, Craig ne le dit pas. Il ne l’admettait pas, il n’en avait même pas conscience. Ça va, c’était quoi, de la mousse et un pouce délicatement posé sur ses lèvres, pendant que leurs regards s’étaient croisés ? Rien du tout, voyons. Craig nota quand même que ça faisait longtemps qu’on ne l’avait pas touché de quelque manière que ce soit, et qu’il ne s’était pas rendu compte d’à quel point ça lui avait manqué. Si seulement Tobias avait été une femme…
Mais parlons plutôt de langues, hein, comme si ça allait relever le niveau. Buvant de nouveau sa bière (et s’essuyant la mousse tout de suite pour s’éviter un nouveau moment de gêne), Craig nota qu’ils étaient plutôt complémentaires avec Tobias, puisqu’ils n’avaient que l’anglais et le chinois en commun dans leurs compétences en langues étrangères.
— Ouais j’avoue. J’aimerais bien apprendre le français mais j’ai l’impression que c’est bien compliqué quand même. T’en penses quoi ? Ou alors l’italien, quelque chose de mélodieux et d’un peu sensuel. Quoique, murmuré, le chinois et l’allemand c’est quand même super joli. Faut entendre les ballades de Rammstein… Bon, je te conseille pas Bück Dich, Rein Raus ou Mann gegen Mann, hein…
Damn. Pourquoi il avait cité cette chanson en particulier ? Pourquoi celle-là ? Il n’avait rien contre les hommes qui s’aimaient entre eux, mais il ne s’était jamais senti concerné. Jamais jusqu’à… Nan, il devait sûrement juste être en manque.
(c) DΛNDELION
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Mar 18 Sep - 18:05
Nocturnal Animals.
Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes Ft. Craig Forbes
T’inquiète pas, c’est rien. - Mais oui, voilà, je m'inquiète pas, c'est rien. Rien du tout. C'est quoi après tout? J'ai juste.. J'aurais pu faire avec un torchon, ou juste le lui dire, ou lui tendre une serviette en papier ou lui lécher la face. Oui voilà, j'aurais pu faire ça à y être! Un Lion de la Trinité! Sans déconner! C'est la faute à la fatigue. Ou à la bière. Ouais, c'est ça, j'arrête de boi... Et merde, trop tard, voilà que j'avale une nouvelle gorgée. Fuck.
Ouais j’avoue. J’aimerais bien apprendre le français mais j’ai l’impression que c’est bien compliqué quand même. T’en penses quoi ? Ou alors l’italien, quelque chose de mélodieux et d’un peu sensuel. Quoique, murmuré, le chinois et l’allemand c’est quand même super joli. Faut entendre les ballades de Rammstein… Bon, je te conseille pas Bück Dich, Rein Raus ou Mann gegen Mann, hein… - J'arque un sourcil, pas plus familier avec la langue qu'avec la culture... Quoi que j'ai eu mes expériences avec la gente allemande durant mes années à l'académie, mais on prenait pas vraiment le temps de... papoter langage. On utilisait juste nos langues pour autre chose. Enfin bref, les détails sont pas importants.
Alors, je peux pas vraiment relever la référence, mais je te crois. Cela dit je suis d'accord, la langue française est une véritable plaie. Tellement de temps de conjugaison différents que ça en est ridicule. - Je pose mon verre de bière pour attrape le torchon et enfin finir de sécher les verres qui s'égouttaient là. Il n'en reste que deux, je vais pas y mettre la nuit. - Mais je pense que c'est plus compliqué pour les anglophones de la maîtriser, parce que notre conjugaison est bien plus simple. Pour les européens c'est plus simple, c'est des langues latines. - Est-ce que j'étale ma science? Ouais, un peu trop d'ailleurs.
Cela dit, ouais, c'est réputé comme sensuel comme langue. Va savoir pourquoi. Y'en a tu leurs dis "Salut, toi. Comment ça va?", ils commencent déjà à trembler. - Hmhm. Tout à fait. Exemple nécessaire. Finit de sécher tes verres tiens. - Mais si t'as besoin d'aide pour apprendre, je connais. Quoi que t'as peut-être accès à un tutorat toi, non? Via... Le travail? - Ne donnons pas plus de poids à son rang qu'il n'en a besoin. J'ai pas besoin de ça, et j'ai la sensation que c'est la dernière chose qu'il veut qu'on lui rappelle à cet instant.
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Mer 19 Sep - 8:39
Nocturnal Animals
Craig & Tobias
« I wish that I could disappear / Unzip my skin and leave it here / So I could be no one again » Staind – Blow Away
Aucun des deux hommes n’étaient dupes : cette histoire de langues étrangères, c’était juste pour noyer le poisson, pour parler d’autre chose que de ce drôle de geste qu’avait eu Tobias. L’alcool faisait parler Craig bien plus que davantage, mais sûrement pour en dire bien moins : il se perdait en circonvolutions, citant des trucs que lui connaissait sans imaginer un seul instant que ce n’était peut-être pas le cas du barman.
— Rha tu connais pas Rammstein ? Comment t’as pu traverser les années 90/2000 là exactement ?
Avec un rire plus amusé qu’autre chose, Craig continua à descendre son verre. Ce que disait Tobias était sûrement vrai à propos du français, mais il trouvait quand même l’argument foireux. Lui qui connaissait le finnois et le japonais savait que ce n’était pas les conjugaisons qui allaient lui faire peur. Ou, entre l’allemand et le finnois, les langues casuelles. Il devrait tester le latin un jour, ça pourrait être rigolo.
— Bah après ça dépend, j’aime bien les syntaxes un peu tordues, du moment qu’on me les explique bien. En finnois y’a bien 7 groupes de verbes différents, avec des conjugaisons distinctes, et puis comme en allemand ou en latin, y a des cas genre nominatif, accusatif, datif, génitif, partitif… D’ailleurs en finnois j’ai jamais bien compris le partitif, je le mets juste partout, dans le doute. Je suis un terrible étudiant, vois-tu.
Il rit à nouveau, avant de revenir sur les langues latines et leur supposée sensualité innée. Il est vrai qu’il aimait beaucoup entendre de l’italien, qu’il soit parlé ou chanté, ce qui n’était pas forcément le cas de l’espagnol. Pourquoi, il n’en savait rien. Mais quand Tobias se mit, pour l’exemple, à lui parler en français (rien de bien insurmontable, il pensait avoir compris), un frisson lui remonta le long de la colonne vertébrale. Oui, c’était agréable à entendre, même parlé par un anglophone. Quant à avoir un tutorat… C’était pas impossible, en soi, mais quelque chose bloquait.
— La logique voudrait que je demande à Agathe de m’apprendre…
Clairement, l’idée ne l’enchantait pas des masses. Il n’aurait pas trop su dire pourquoi, sûrement un mélange de plein de choses différentes, entre le fait qu’elle lui faisait parfois peur, qu’elle était aussi inaccessible que lui en apparence, qu’ils étaient tous deux de la Trinité ou que, puisque c’était une femme, elle ne prenne ça pour des avances de sa part. Le pire étant que s’il demandait à quelqu’un d’autre d’être officiellement son professeur, cela pouvait aussi se retourner contre lui : Agathe pourrait bien se vexer qu’il n’ait pas pensé à elle. Bref, Craig se sentait un peu coincé à ce niveau-là.
— C’est pas grave, je vais me contenter de mes germaniques et scandinaves. Au point où j’en suis, je pourrais aussi ajouter le néerlandais, ça fait une belle passerelle entre le danois et l’allemand. Non mais sérieusement, écoute Rammstein.
Là, l’alcool prit le pas. Il n’avait pas bu tant que ça, mais sur un estomac vide et avec un foie qui n’avait pas l’habitude d’être traité ainsi, ça tapait plutôt fort.
— Das Schicksal hat mich angelacht und mir ein Geschenk gemacht Warf mich auf einen warmen Stern Der Haut so nah dem Auge fern. C’est le début de la chanson. C’est joli, non ? Fin je sais pas, je trouve. En plus même les paroles sont pas mal, fin, le début. Je sais pas ce que t’en penses : « Le destin m’a souri et m’a offert un cadeau, m’a jeté dans la chaleur d’une étoile, si près de la peau si loin des yeux. »
Ouais, bon, maintenant qu’il lui balançait la traduction, ça redevenait bizarre. La seule autre chanson qu’il avait eu en tête sur le coup pour illustrer à quel point l’allemand pouvait être sexy, c’était Ohne Dich et ç’aurait sûrement encore plus gênant. Enfin ça dépendait. C’était quoi le plus embarrassant : parler de cul, ou parler de sentiments ? Parce que bon, c’était pas clair ces histoires.
— Bref, je trouve l’allemand joli et la plupart du temps quand je le dis on me regarde avec de grands yeux comme si je venais de dire une énormité. Un peu fatigant.
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